Hier, chez le cardio (et je vous promets que tout est vrai !)
J'étais déjà allée chez ce cardio il y a une petite dizaine d'années (je crois) lorsque ma généraliste m'avait fait un check-up complet. Elle m'avait prévenue qu'il était un peu spécial, qu'elle n'expédiait pas tous ses patients chez lui mais qu'avec moi, elle n'avait pas trop de crainte (nous nous connaissons bien et nous apprécions) et, surtout, que c'était un bon cardio.
Pour être spécial, il l'est. Mais je dois avouer que j'avais oublié cet épisode.
Donc, hier, je retrouve un peu difficilement son cabinet (au fond d'une cour, sur une coursive extérieure qui fait tout l'étage avec des portes semblables
).
Secrétaire peu aimable qui me demande avec défiance si je suis déjà venue. Ben oui, il y a longtemps mais j'ai même un rendez-vous.
Elle se radoucit immédiatement et vérifie mon adresse (qui a changé entretemps) et, je suis admise dans le saint des saints, la salle d'attente. J'avais emporté ma liseuse et me plonge dedans pour tromper l'attente et...l'angoisse.
Une jeune fille étail là qui tournait un peu en rond. Une autre assistante arrive et, en enfilant sa blouse, se met à discuter avec elle. De vieilles connaissances à n'en pas douter.
Quelques bruits de portes et déboule dans la pièce une petit monsieur avec des moustaches blanches en guidon de vélo, des favoris, blancs aussi, qui font la liaison avec une masse de cheveux aussi mal peignés que les miens. Il appelle la jeune fille par son prénom.
Ils disparaissent tous les deux mais j'ai à peine le temps de baisser les yeux qu'il réapparaît :
- Bonjour Madame, je ferme la porte parce que je consulte dans le couloir me dit-il en se fendant la pêche. C'est pas long ! Et il joint le geste à la parole.
La porte claque et me vient évidemment l'idée idiote : heureusement que je ne suis pas cardiaque !
Un moment après, il revient, toujours aussi rapide et, le temps que je ferme la liseuse et me lève, il me tend la main ou les bras, je ne sais pas trop
Je traverse la salle d'attente en me demandant s'il va me faire la bise
Au dernier moment, il s'efface et me serre chaleureusement la main
On enfile le couloir de quelques mètres et, reprise par cette foutue angoisse, je n'écoute pas le début de sa phrase mais je reprends contact avec la réalité quand je l'entend dire
- .... C'est affeux mais vous vous rendez compte, je suis un vieux, je vais avoir 70 ans en août !!!
- Euh... moi aussi.
- Oui ? Mais vous, vous êtes mieux conservée ! Et il stoppe brutalement. Il rigole et il rit encore plus quand je lui rentre dedans.
A partir de ce moment, il me tutoie.
- Vas-y installe toi ! On va voir si tout va bien. (Il regarde ma fiche sur l'ordi ) Mais c'est vrai, on a le même âge et tu es aussi du mois d'août. moi c'est le 25 !
- Et moi, je suis plus vieille encore, je suis du 1er ! Et....
Il me coupe la parole et sort exactement ce que j'allais lui dire : "Et Je te dois le respect"
Du coup, on rit tous les deux. Puis il devient sérieux quand il lit la lettre de ma généraliste.
En fait, il faut suivre
Il me vouvoie quand il parle "médecin" et le tutoiement revient quand il me raconte des tas de trucs. J'apprends, dans le désordre, qu'il n'est pas allé dans le même hosto que moi pour un carcinome à enlever; que j'ai 19 de tension au bras droit, qu'il sait qu'il est impressionnant mais qu'il ne doit pas, quand même, faire monter mon rythme cardiaque, qu'on va attendre un peu avant de reprende le tensiomètre, qu'il est allé une fois à Ste Anne (l'hosto où j'étais hospitalisée) mais que ce sont des militaires et qu'il a senti qu'il vallait mieux "fermer sa grande gueule" (
tu m'étonnes ), que sa femme veut qu'il prenne sa retraite mais qu'il a encore des patients qu'il ne veut pas abandonner, qu'il faut quand même des examens complémentaires car, pas dramatique, mais faut que je me surveille, qu'il ne sait pas si le carcinome ne va pas demander une autre opération et qu'il a les jetons, qu'il aime bien le bateau mais n'a pas le temps et que sa femme nage comme un fer à repasser, qu'il est possible que j'ai à prendre encore un médoc pour la tension et qu'il compatit car il voit bien que la perspective me réjouit
Enfin, il sort avec moi du cabinet et demande à ses deux assistantes de me trouver un RV "pas pour dans 6 mois" il entrouvre la porte de leur bureau et je l'entends leur glisser : "Cest une copine !"
Il se saisit alors de ma main (Mais il va me la lâcher ma mimine ?
) pour un au-revoir encore plus chaleureux que son accueil.
Il est vraiment sympa mais je comprends qu'il ne plaise pas à tout le monde.
Ce qui est drôle, c'est que les deux secrétaires se sont mises en quatre (pardon en 8
)pour me trouver une date. Et on sent qu'elles adorent leur "patron" !
Voilà une bonne partie de mon après-midi d'hier
Maintenant, je file faire cuire des artichauts pour ce soir
Bonne soirée à tous et